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  • La procrastination

    La soif de parfait peut avoir des effets pervers : l'incapacité à entreprendre.

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    En effet, ne rien faire permet d’éviter la douloureuse comparaison entre ce que l’on espérait et ce que l’on réalise.

    La peur génère une angoisse qui peut aller jusqu’à la paralysie. Confrontées à une tâche importante, les personnes qui en souffrent ont tendance à, soit se mettre au travail de manière frénétique, soit procrastiner. Cela correspond plus à un processus d’évitement et de protection qu’à une volonté d’échouer ou de la paresse. Pour ne pas à avoir à affronter la tâche, elle est remise à plus tard, voire à jamais. Aussi, si la personne s’y prend à la dernière minute et qu’elle échoue, elle pourra attribuer le résultat négatif au fait qu’elle ait manqué de temps.

    Cette tendance à éviter les situations lorsqu’on a l’impression d'être jugé se retrouve chez le phobique social. Ce dernier adopte une attitude perfectionniste dans sa recherche de l'approbation des autres. Il perçoit que ses exigences élevées ont été fixées par les autres, bien qu'il soit généralement beaucoup moins exigeant envers les autres qu'envers lui-même. Ainsi, il possède la croyance : «je dois être parfait sinon les autres ne m'aimeront pas ». D'autres individus perfectionnistes sans phobie sociale sont conscients qu'ils se fixent eux-mêmes ces exigences trop élevées et possèdent, eux, la croyance : «je dois être parfait, sinon je ne m'aimerai/me respecterai pas ».

    Dans l’immédiat, ce que nous avons tendance à regretter, ce sont surtout les choses que nous avons faites (lorsqu’elles ont échoué, bien sûr). Mais sur le long terme, ce sont plutôt les choses que nous n’avons pas faites, nos intentions qui n’ont pas été réalisées.  

    Le procrastinateur vit avec ce cercle vicieux : 

    Je ne fais rien --> Pas de réussite, mais pas d'échec non plus --> Je ne prends pas confiance en moi grâce à mes réussites --> Ma peur de l'échec augmente --> Je ne fais rien ... 

    En voici un qui donnerait de meilleurs résultats : 

    J'ose faire --> Si je rate je recommencerai --> Si je réussis, je prends davantage confiance en moi --> Ma confiance en ma réussite augmente --> J'ose faire ...

    La prise de risque augmente la confiance en soi.

    Les recherches sur la procrastination montrent que ce n’est pas un problème de gestion du temps au départ : c’est un problème de gestion des émotions.
    On procrastine parce qu’une tâche nous fait ressentir quelque chose de désagréable (stress, peur de l’échec, ennui, impression d’être submergé, etc.).
    Alors notre cerveau nous pousse à éviter cette tâche pour soulager notre malaise à court terme.

    Ce qui peut vous aider:

    1. Travailler sur la régulation émotionnelle

    • Accepter l'inconfort : reconnaître que commencer une tâche désagréable est normal, sans attendre de "se sentir motivé".
    • Auto-compassion : être gentil avec soi-même quand on procrastine au lieu de se culpabiliser (ce qui empirerait encore plus l’évitement).
    •  Piers Steel (« The Procrastination Equation ») insiste beaucoup sur la peur de l’échec et l’autocritique.

    2. Utiliser des stratégies comportementales

    • La technique des "petits pas" : se fixer un tout petit objectif (par ex. : « ouvrir le document », pas « finir le rapport »).
    • La règle des 2 minutes : si une action prend moins de 2 minutes, fais-la tout de suite.
    • Structurer des routines : automatiser certains débuts de journée pour "bypasser" la décision consciente (réduire le temps où le cerveau réfléchit s'il va agir ou non).

    3. Modifier son environnement

    • Supprimer les distractions : smartphone loin, bureau épuré...
    • Créer un engagement externe : se donner un délai avec quelqu'un d’autre (rendez-vous, collègue, coach).

    4. Travailler sur la perception de la tâche

    • Redonner du sens : se reconnecter à pourquoi cette tâche est importante pour soi.
    • Reformuler la tâche : se dire "je choisis de..." au lieu de "je dois..." (ça change la dynamique intérieure).

    La procrastination se soigne donc moins par la discipline brutale que par la bienveillance envers soi-même (comme souvent! :)), la gestion des émotions et des micro-actions concrètes. 

    Quelle est la plus petite chose que je puisse faire, là maintenant ?

    Anne-France Dinant

                         

  • Le faux-self

    ...en particulier chez l'enfant à hauts potentiels.

    fauxself

    Lorsqu’un enfant s’adapte de manière forcée à son environnement, il accélère la maturation de son développement. Si l’écart entre ce qu’il trouve et ce qu’il attend ne dépasse pas ses capacités d’adaptation, alors l’intégration peut s’effectuer et l’enfant va pouvoir s’approprier ses potentiels et découvrir des solutions personnelles.

    Si, au détriment de son propre rythme, l’enfant doit nécessairement trop s’adapter aux désirs de l’environnement, un conflit entre ses besoins internes et la réalité se développe.

    Deux solutions se présentent à l’enfant : développer des symptômes de mal-être ou se suradapter et accélérer la maturation  de son développement. C’est ce dernier mécanisme que Winicott a appelé « le faux-self ».  Dans le cas d'un faux self établi chez une personne avec un potentiel intellectuel important, le faux self a tendance à siéger dans l’esprit. L’individu est en souffrance, même si cela ne se voit pas toujours. Il est possible que cette souffrance s’accroisse plus la réussite académique et sociale sera avérée, avec un sentiment de « fausseté » apparente.

    Le faux self a une fonction positive nécessaire : l'adaptation et la protection du vrai self. C’est donc le déséquilibre des rapports entre les deux « self », une scission trop importante, qui peut induire et indiquer un état pathologique. Ainsi, chez certains enfants, le faux self va prendre toute la place en grandissant. Ils peuvent devenir brillants et recevoir les encouragements, l’admiration, mais se sentir de plus en plus seuls, vides et malheureux. Les conséquences de ce faux self sont un perfectionnisme, le déni de leurs émotions, des relations humaines empreintes de culpabilité ou de honte, des pulsions agressives, ou encore une dépression. ll arrive un moment où les tensions entre le vrai et le faux self deviennent trop fortes. Un processus d’autodestruction peut alors s’exprimer de diverses manières : affections psychosomatiques, auto-mutilations, etc.

    Restreindre son faux self et retrouver son vrai moi donne un sentiment de sécurité et un apaisement.

    Sebire & Stanilewicz (2018) appelle « le syndrome de l’albatros » le fait que certains enfants renoncent à leur intelligence pour se sentir comme les autres.

     

     Anne-France Dinant